En patinant par pur plaisir, Gary Beacom remporte les honneurs à la compétition de patinage artistique pour les adultes de ISU
La merveilleuse vie d’aventure de Gary Beacom a pris un nouveau tournant le mois dernier quand il a décidé de s’inscrire pour la première fois à la compétition de patinage artistique pour les adultes de ISU tenue à Obertsdorf, en Allemagne.
Cet homme de 54 ans se démarque par son petit sourire énigmatique, son esprit curieux et son désir de prendre un nouvel envol. Pourquoi faudrait-il faire comme les autres?
Il n’a pas réalisé les prouesses de sa jeunesse au cours de laquelle il a remporté deux fois la médaille d’argent canadienne en 1983 et en 1984, derrière Brian Orser, s’est classé en 11e place aux Jeux olympiques de 1984, a gagné les championnats du monde de patinage professionnel et a attiré la curiosité des icônes Jayne Torvill et Christopher Dean qui l’ont invité à se joindre à leur tournée mondiale, impressionnés par ses transitions astucieuses, son style remarquable et inspirant, et sa créativité.
Sa quête aux championnats pour les adultes était bien plus simple. « Je ne la considérais pas comme une compétition, a-t-il déclaré pendant un arrêt à Toronto en route pour retourner chez lui à Victoria, en C.-B. Ça a été une belle occasion de me rendre à la compétition, de faire de mon mieux, de m’assurer que mon programme tenait compte des règlements et de jouer le jeu. » Il n’avait pas pris part à des compétitions depuis l’adoption du nouveau système de notation de l’UIP et du code de points. Il a veillé à n’oublier aucun élément et s’est entraîné aux pirouettes de niveau quatre et au jeu de pieds.
En effet, le nombre record de concurrents (432 concurrents âgés de 28 à 78 ans et des tailles de groupes record allant jusqu’à 35 concurrents en comparaison des 332 patineurs inscrits l’an dernier) est de bon augure pour l’avenir du patinage chez les adultes qui prennent plaisir à patiner et à rester en forme et en santé toute leur vie en pratiquant le patinage. Qu’on se souvienne du parcours de Midori Ito qui a gagné l’an dernier, mais qui a présenté en 2011 un programme qui contenait bien moins d’éléments que le nombre exigé, incertaine des règlements. Elle a pris part à la compétition pour le plaisir et a applaudi tout un chacun. De retour dans son pays, continuant à enseigner le patinage, elle a reçu de plus en plus de demandes d’adultes. Elle a compris qu’elle avait une seconde chance de célébrer son sport de nouveau.
Dans son for intérieur, Gary Beacom aurait aimé réussir de triples flips et de triples Lutz. Il prétend avoir encore la force et l’habileté, et il prend soin de son corps. Il a même rêvé qu’il exécutait un triple Axel – un saut ambitieux pour un homme de sa génération, et surtout pour son âge – mais il n’y est pas arrivé. Il a réussi un triple Salchow l’an dernier. Il y a quelques années, il a aussi exécuté un triple Lutz. Il avoue qu’il s’efforce de se débarrasser de ses mauvaises habitudes et d’améliorer ses sauts.
Son talon d’Achille? Une vieille blessure chronique à la cheville qu’il a subie il y a plusieurs années en jouant au volleyball, en tentant de bloquer un smash. Sa jambe a glissé sous le filet et un lourd géant est tombé sur sa jambe, lui faisant une entorse grave. Lorsque Gary Beacom exécute trop de sauts, sa cheville le hante. Il s’entraîne à une technique qui lui permettrait une réception des sauts plus en douceur. Et il s’est procuré une nouvelle paire de bottes il y a quelques mois, des bottes rustiques dont la partie supérieure imite un cuir d’alligator rigide ainsi que des fixations de lames solides. Ses bottes ne sont pas belles, mais il avait besoin d’un bon appui pour sa cheville estropiée.
Aux championnats pour les adultes, Gary Beacom a remporté une belle victoire. En plus de s’emparer de la Masters Elite III free skate chez les hommes (pour les patineurs de 48 à 57 ans) par plus de 17 points, il a également gagné le prix du programme libre artistique par près de 8 points, obtenant une note élevée de 9,75 pour sa performance. Il n’a même pas jeté un coup d’œil à ses notes. Par-dessus tout, il a remporté le prix Paula Smart pour la note la plus élevée dans l’épreuve de patinage artistique (femmes et hommes confondus). Cette victoire l’a ravi plus que toute autre.
« Je suis vraiment fier de ce prix, dit-il. Les femmes qui se sont classées parmi les trois premières dans la catégorie Masters Elite II (38 à 48 ans) étaient géniales et créatives ».
Gary Beacom avait une fière allure en patinant au son d’une version funky de la sonate au clair de lune de Beethoven, vêtu d’un blue-jean délavé (préférant se montrer tel qu’il est sur la glace) et exécutant son programme à la Beacom, c’est-à-dire en improvisant une partie du programme. Évidemment, il savait à quel moment il devait exécuter le jeu de pieds et les pirouettes. Le reste reposait sur l’émotion du moment. « Je crois que grâce à l’improvisation, nous donnons une certaine fraîcheur, une certaine vie, un ici et maintenant à la performance qui ne peut être réalisée dans un programme établi d’avance » ajoute-t-il.
Il se doutait bien que la compétition ne serait pas féroce : il n’y a pas encore beaucoup de patineurs d’élite qui participent à la compétition. Toutefois, Gary Beacom croit que la popularité de l’entraînement continu des habiletés attirera un jour certains des meilleurs patineurs. On peut toujours prétendre que l’élite a eu ses heures de gloire dans le passé et se demander s’il ne serait pas maintenant temps pour le commun des mortels d’en profiter. N’empêche que la femme qui a terminé en deuxième derrière Midori Ito l’an dernier était fière de partager le podium avec elle. Et ça a été agréable. Et ça a été amical. Et la glace était parfaite et la compétition bien organisée. Et ils attendent avec impatience d’y retourner.
Pour Gary Beacom, la compétition avait un autre intérêt. Il voulait être vu et « établir des liens avec le monde ». Il a comme activité commerciale des séminaires de patinage. Il n’enseigne pas le patinage de façon régulière, mais il aime se rendre à différents clubs, travailler avec des groupes de patineurs et partager ses connaissances et ses idées créatives.
Comme il finançait lui-même son voyage à Obertsdorf, Gary Beacom a fait quelques dollars en s’arrêtant en Grande-Bretagne pour donner des séminaires à cinq clubs pendant son voyage.
Pendant l’été, chez lui, au Canada, Gary Beacom a l’habitude de monter sur sa moto et de se rendre de Victoria, C.-B., à Ottawa et Toronto, en faisant une halte en chemin dans des clubs pour donner des séminaires. Parfois, il fait un arrêt pour mener des recherches, dit-il. La plupart du temps, le club l’invite à rester tout l’après-midi. « Il y a de nombreuses façons différentes et créatives d’amorcer une pirouette, dit-il, à titre d’exemple. C’est un aspect qui n’a pas été exploré dans le monde du patinage ».
Mais le voyage à Obertsdorf a donné lieu à des invitations à participer à des compétitions pour les adultes en Nouvelle-Zélande et en Australie, et à donner des séminaires. Il a reçu 150 « J’aime » sur sa page Facebook après la compétition ainsi que des « commentaires des plus gratifiants ».
« Ça a vraiment renforcé ma confiance en moi et fait progresser ma carrière », conclut-il. La compétition de patinage artistique pour les adultes de ISU? Une compétition où tout le monde y gagne.
Beverley Smith
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